Les photographies
(Huit photographies noir et blanc prises dans le jardin de Kerzafloc’h un après midi de juillet 2000).
Le soleil inonde la terrasse de la maison de Kerzafloc’h. Les enfants s’amusent. Sur les deux premières photographies Alix défie l’objectif de l’appareil photographique. Ensuite, elle détourne son regard. Elle appuie son front sur le barreau d’une chaise du jardin. Elle observe les méandres des pierres disposées en patchwork sur le sol ou bien cette racine incrustée dans le bois de l’écorce.
Elle entend très bien ce que je lui dis.
Le drap
(Drap en toile métis brodé avec du fil de coton blanc au cours de l’été 1988 par la mère d’Alix. Largeur : 232 cm, longueur : 294 cm. Au centre, à 24,5 cm du bord, le monogramme composé des initiales en majuscule MCR est exécuté au point de cordonnet droit. À 7 cm du bord une rangée de brides cordonnées isolées court sur toute la largeur du drap. Plusieurs traces de brûlures sont présentes.)
C’est un drap blanc en toile métis. Je l’ai probablement brodé au cours de l’été 1980. J’avais alors 17 ans. J’ai le souvenir précis d’être sur le petit balcon de la maison de St Brévin-Les-Pins. Je suis assise dans l’un des vieux fauteuils en osier apporté par mon père au retour d’un voyage en Asie. De cet endroit, j’ai un point de vue assez étendu sur la route. Je peux regarder et écouter le mouvement permanent des gens qui vont à la plage ou en reviennent. Sur ma gauche, une petite brise m’apporte le parfum du mimosa dont les branches chargées de ses petites boules d’or veloutées frôlent la balançoire.
À la fin des vacances, lorsque mon ouvrage fût terminé, je le pliais soigneusement et le rangeais dans l’armoire de ma chambre à Nantes.
Dix ans plus tard, je décidais, lors d’un de mes passages chez mes parents, de l’emmener à Paris et de m’en servir enfin. Mais l’idée me vînt qu’avant d’en faire usage je devais le repasser. J’avais installé la table dans la longueur de l’entrée de l’appartement que j’occupais à Paris, au 375, rue de Vaugirard, 4ème étage face (pas de code, ni de concierge). Les brûlures que le drap subit ce jour-là le rendirent inutilisable. Je le repliais et le plaçais tout en haut de la grande penderie.
Quelques temps après, je rencontrais Franck.
Influences
La lumière : du visible à l’invisible (Passion des sciences), La mutation du visible (Philippe Hamou), Sophie Calle : M’as-tu vue (Centre Pompidou, 2003), Giuseppe Penone : Retourner ses propres yeux (1970), Encyclopédie des ouvrages de dames par Thérèse de Dillmont (1980), Le métier de Zeus : mythe du tissage et du tissu dans le monde gréco-romain (John Scheid et John Svenbro), Aquarelle réalisée par la mère d’Alix (Terrasse de St Brévin, août 1982).